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Livres de science-fiction faciles à lire : 14 idées pour tous les goûts

La science-fiction, c’est forcément difficile ? Il s’agit en tout cas de l’un des (nombreux) préjugés dont souffre ce genre. Pourtant, je suis persuadée que tout le monde peut y trouver son bonheur. Oui, les histoires reposent sur des progrès scientifiques ou technologiques. Mais une fois ce point de départ établi, tout devient possible. La SF, ce n’est pas forcément des combats de vaisseaux spatiaux ou des grandes théories scientifiques ! Tous les choix s’offrent à vous : des aventures dans le futur (mais parfois dans un avenir très proche et donc parfaitement réaliste), ou dans un passé réinventé, ou encore un univers parallèle au nôtre.

Parmi cette multitude de catégories, il existe bien entendu des livres de science-fiction faciles à lire, y compris si vous êtes débutant. Alors, si vous avez envie de vous lancer, n’hésitez pas : la SF est accessible à tous. Et si vous cherchez des conseils de lectures pour vos premiers pas dans ce nouveau monde, suivez le guide !

Faut-il commencer par les grands classiques de la science-fiction ?

Les listes de recommandations de romans de SF commencent souvent par les mêmes titres ultra-connus que sont 1984, Fondation, Fahrenheit 451 ou encore les ouvrages de Barjavel. Est-ce une bonne idée d’aborder le genre avec ces grands noms ? Selon moi, non. Bien entendu, il s’agit de livres visionnaires, en avance sur leur temps, qui ont servi d’inspiration depuis des années.

Mais c’est bien là le problème : aujourd’hui, nous sommes tous profondément imbibés de ces références culturelles, qui ont largement infusé le paysage cinématographique et littéraire. Les thèmes abordés, novateurs à l’époque de leur publication, nous paraissent donc familiers, voire dépassés. Vous pourriez alors avoir l’impression de lire une histoire déjà vue et revue, même si vous avez entre les mains le texte « originel ».

De plus, le lecteur de 2024 risque fort de grincer des dents devant les clichés, les représentations et les valeurs qui sous-tendaient la société au moment de leur écriture.

Enfin, sans sous-estimer l’importance de ces pièces fondatrices, je pense qu’il est salutaire de montrer que la SF ne s’est pas arrêtée là ! La relève ne cesse de grandir, des œuvres ambitieuses et marquantes sont publiées. Commencer la science-fiction par ces auteurs et autrices contemporain(e)s constitue un choix tout aussi passionnant.

Se mettre à la SF sans s’en apercevoir avec des titres qui mélangent les genres

De nombreux romans contiennent quelques éléments de science-fiction, qui donnent une saveur particulière à l’intrigue sans en constituer le centre. Ils peuvent donc s’avérer motivants et rassurants, puisque vous retrouverez surtout les codes habituels de votre domaine de prédilection.

Du polar avec Les sept morts d’Evelyn Hardcastle de Stuart Turton

Si vous cherchez de l’originalité, voilà le livre qu’il vous faut ! Un whodunit dans la lignée des célèbres enquêtes d’Agatha Christie, avec une ambiance de vieux manoir victorien, au milieu des nobles et des domestiques.

Le twist ? Le narrateur, chargé de démasquer l’assassin, ne cesse de revivre la même journée, débouchant fatalement sur la mort d’Evelyn Hardcastle. Et à chaque fois, il se réincarne dans la peau d’un nouveau personnage, ce qui lui permet d’avoir une vision de plus en plus complète du déroulement de ces quelques heures.

L’auteur gère son intrigue de façon virtuose, chaque détail trouve sa place de façon jubilatoire. En revanche, cette lecture n’est pas de tout repos : l’histoire forme un vrai puzzle. La complexité ne provient pas spécialement de l’aspect SF, mais plutôt de la multitude d’informations et de personnages parmi lesquels il faut naviguer.

Le plaisir reste malgré tout bien présent, car le côté addictif prend le dessus, propulsant le lecteur de retournements de situation en révélations surprenantes. Action et mystère dans la campagne anglaise, comment résister ?

Du suspense/thriller avec Dôme et 22/11/63 de Stephen King

Connu comme le « maître de l’horreur », on associe en général Stephen King à l’épouvante et au fantastique. Pourtant, plusieurs de ses titres présentent des composants de science-fiction, sans constituer le sujet principal. On y retrouve les ingrédients qui font le succès de l’auteur : des intrigues bien ficelées et mystérieuses, des personnages creusés, et une imagination fertile pour surprendre le lecteur.

Dôme nous emmène dans une petite ville américaine qui se retrouve du jour au lendemain prisonnière d’un immense dôme transparent, impossible à traverser. Le phénomène sert de prétexte au King pour construire un huis clos, instillant un climat de terreur chez les habitants.

Les deux tomes contiennent des longueurs, mais ils sauront vous séduire si vous êtes adeptes de ces petits riens qui font la substance des nombreux protagonistes. Un roman sombre sur les rapports humains et la société américaine.

22/11/63 est régulièrement cité comme l’un des meilleurs ouvrages de Stephen King. Il s’agit d’une uchronie, c’est-à-dire une réécriture de l’Histoire : l’auteur se base sur des faits réels, puis imagine ce qui aurait pu se passer si un événement avait été modifié. Ici, Jake se voit confier la mission de retourner dans le passé pour empêcher l’assassinat de Kennedy.

Avec ce voyage dans le temps, nous sommes donc en plein dans une thématique de pure SF. Mais ce n’est ici qu’un point de départ, permettant à une histoire gorgée de suspense de se déployer sur des années, et de nous plonger au cœur des sixties. Une brique de 900 pages, oui, mais captivante et savoureuse.

Un journal intime avec Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes

Vais-je à nouveau vous parler, sans aucun scrupule, de ce récit coup-de-poing ? Évidemment ! Bouleversant, inoubliable, intemporel : tout ce que vous avez pu entendre sur ce livre est justifié. Il fait l’unanimité et mérite largement sa réputation.

Le pitch en quelques mots : Algernon, une souris de laboratoire, et Charlie, un jeune homme doté du QI d’un enfant de six ans, subissent une opération expérimentale permettant d’augmenter leur intelligence. Charlie découvre alors un nouveau monde insoupçonné, vaste et complexe. Mais aussi cruel. Nous sommes dans la tête de Charlie, aux premières loges pour vivre ses transformations et les interrogations qui naissent en lui.

Voilà la prouesse de cette œuvre : le lecteur est immergé dans les émotions de Charlie et développe une empathie immense. On découvre avec lui que la connaissance n’apporte pas la bienveillance, et que l’innocence semble parfois préférable. L’aspect scientifique reste présent, mais s’efface derrière la richesse psychologique du personnage et l’observation des relations humaines.

Privilégier des textes de science-fiction courts

Si les romans présentés ci-dessus permettent de se frotter à la science-fiction sans qu’elle constitue le cœur de l’histoire, plusieurs d’entre eux sont (très) longs. Vous n’aimez pas les pavés ? Vous avez envie de vous attaquer à des thématiques classiques de la SF, sans vous engager pour des centaines de pages ? Alors, piochez parmi cette sélection d’ouvrages courts, parfaits pour vous mettre en jambe !

Apprendre, si par bonheur de Becky Chambers

Une novella de 140 pages qui développe une réflexion profonde, construit des relations émouvantes et provoque un investissement total dans l’histoire ? Mission accomplie ! Vous embarquez avec quatre astronautes ayant pour mission d’explorer des planètes susceptibles d’abriter la vie. Mais ici, l’objectif n’est pas de trouver une nouvelle terre à coloniser : il s’agit d’une quête de connaissances.

Tous les éléments sont parfaitement dosés : les concepts scientifiques sont vulgarisés, la découverte de nouveaux univers apporte un dépaysement total, et l’intrigue nous fait osciller entre joies intenses, espoir et nostalgie. On ressent la beauté de l’espace, la concentration des chercheurs durant les procédures à appliquer, leur tristesse inégalée devant l’écart qui se creuse avec les humains restés sur Terre.

Ce texte soulève de nombreuses questions, sur le but de la science et la soif de savoir, ou l’utilité d’investir dans l’exploration spatiale quand notre propre planète va si mal. Ce petit morceau d’humanité parti voguer dans l’immensité nous serre la gorge, et l’émotion est rendez-vous au moment de refermer, à regret, cette œuvre si atypique.

Couverture du livre Apprendre, si par bonheur de Becky Chambers

La collection Une Heure-Lumière chez Le Bélial’

Voici LA collection parfaite pour plonger dans la diversité de la SF ! De courts récits, écrits par des valeurs sûres du genre, qui vous permettront de découvrir des thématiques variées et de déterminer ce qui vous plaît le plus. Certaines histoires sont plus complexes que d’autres, il y en a donc pour tous les goûts.

Parmi les titres qui me semblent accessibles à tous, je recommande notamment Sweet Harmony de Claire North. Dans le monde d’Harmony, le bien-être est total. Tous les problèmes de santé, physique ou mentale, sont réglés par des nanotechnologies, vendues par la société Fullife. Si l’on y met le prix, on peut donc vivre dans le bonheur, la beauté et la jeunesse. Mais un jour, Harmony se réveille avec… un bouton. Vous ne voyez pas le souci ? Lisez cette dystopie grinçante et féministe !

Vous pouvez également vous jeter sur Les meurtres de Molly Southbourne de Tade Thompson (premier tome d’une trilogie de novellas), ou encore La millième nuit d’Allastair Reynolds.

⏩ Si vous avez envie de dévorer des romans courts, tous genres confondus, ma liste de titres percutants est faite pour vous !

Se lancer dans le space opera avec des livres de science-fiction faciles à lire

Voici le sous-genre qui vient le plus souvent à l’esprit lorsqu’on évoque la SF. Le principe : des aventures se déroulant dans l’espace, en général dans le cadre de voyages intergalactiques à grande échelle. Navettes spatiales, inventions technologiques encore inexistantes à ce jour, civilisations extraterrestres, batailles interstellaires… Les thématiques abordées peuvent être impressionnantes, mais il existe des titres totalement accessibles aux néophytes.

Binti de Nnedi Okorafor

Ce texte se compose en réalité de quatre novellas, publiées en France en deux tomes. Dans ce space opera pour jeunes adultes, nous suivons une adolescente, Binti, pourvue d’un don pour les mathématiques. Acceptée dans une université interplanétaire située sur une autre planète, elle décide de quitter son peuple, les Himbas.

L’héroïne va ainsi rencontrer des élèves d’espèces très différentes de la sienne, et chercher comment allier sa nouvelle vie avec ses origines et ses traditions. Binti a du mal à trouver sa place, écartelée entre son désir de rester fidèle à ses racines et celui d’évoluer, de satisfaire sa soif de connaissances nouvelles.

Il s’agit en fait surtout d’un récit d’apprentissage, dans lequel l’autrice mêle habilement des éléments inspirés de la culture africaine et un monde technologique futuriste.

L’univers se révèle riche et d’original, les histoires abordent de nombreux thèmes avec subtilité, et elles se dévorent rapidement. Une duologie idéale pour les débutants en science-fiction !

Couverture du tome 1 de Binti de Nnedi Okorafor

Semiosis de Sue Burke

Ce livre passionnant n’appartient pas au space opera à proprement parler, mais au planet opera. Quelle différence ? Ce sous-genre se concentre sur l’exploration d’une planète inconnue, afin d’en découvrir tous les aspects. Semiosis en est une illustration parfaite

Tout commence par un groupe de colons quittant une Terre à l’agonie. Leur objectif consiste à créer une société égalitaire, bienveillante et vivant en harmonie avec la nature. Ils s’installent alors sur une lointaine planète baptisée Pax. Mais l’utopie reste difficile à atteindre : il faut composer avec les défaillances des humains et les éléments hostiles de leur nouvel environnement. Leur stratégie de pacifisme absolue sera fortement malmenée…

Ce que j’ai particulièrement adoré : l’autrice prend le parti de nous raconter cette aventure sur sept générations. Nous faisons donc connaissance avec les descendants des personnages initiaux, et nous assistons ainsi à l’évolution des mentalités et aux conséquences des choix passés. La lutte de la colonie pour survivre et ses dilemmes moraux s’avèrent de plus en plus épineux, mais aussi fascinants.

La communication constitue une thématique centrale de l’histoire, sous bien des aspects. Je n’en dirai pas plus pour vous laisser le plaisir de la découverte ! Foncez sur ce texte à la fois ambitieux et simple, qui vous emportera grâce à son style fluide et dynamique.

Les voyageurs de Becky Chambers

Toujours plus de Becky Chambers, pour le bien de l’humanité ! Les voyageurs est une merveilleuse saga en quatre tomes, qui se déroulent dans le même univers, mais avec des personnages différents. Chaque opus dispose de sa propre fin, et peut donc être lu indépendamment.

Les romans sont surtout reliés entre eux par l’ambiance bienveillante qui s’en dégage. L’autrice analyse avec précision les relations entre individus, qui appartiennent souvent à des espèces différentes, et font face à des divergences irréductibles. Les mœurs, la nourriture, la vie de couple, les morphologies, mais aussi le passé de chaque peuple représentent des sujets de discorde potentielle. D’autant plus quand les personnages doivent cohabiter dans l’espace réduit d’un vaisseau spatial ou d’une station orbitale…

Mais l’altérité se montre aussi source de richesse, et la compréhension mutuelle demeure toujours possible. Sans jamais tomber dans la niaiserie, avec humour parfois, l’autrice s’applique à démonter nos stéréotypes et nos croyances limitantes. Elle remet en question avec intelligence plusieurs composants structurels de notre société.

En conclusion : des livres brillants, qui laissent espérer que d’autres modes de vie sont possibles, et que peut-être, l’avenir n’est pas nécessairement constitué de violence et d’égoïsme. À lire absolument !

⏩ Vous cherchez une autre idée de space opera ? Découvrez ma critique de L’incivilité des fantômes de Rivers Solomon, un roman de SF bouleversant.

Commencer la SF avec des ouvrages graphiques

Paysages post-apocalyptiques, planètes inconnues, villes futuristes… La science-fiction constitue un terrain de jeu infini pour les illustrateurs de tous horizons. Un récit graphique vous assurera une immersion sans pareil et un plaisir décuplé pour vous lancer facilement dans le genre.

Carbone & Silicium de Mathieu Bablet

Cet auteur et dessinateur est devenu incontournable dans le paysage de la bande dessinée française. Son trait très particulier, notamment pour les personnages, est immédiatement reconnaissable, même s’il peut déstabiliser au début.

J’ai bien aimé Shangri-La, avec ses magnifiques illustrations nous plongeant tour à tour dans l’Univers infini et l’ambiance glauque d’une station spatiale, et ses personnages mi-animaux mi-humains.

Mais mon coup de cœur va sans conteste à Carbone & Silicium. Nous y suivons deux androïdes, qui s’aiment dans un monde en pleine auto-destruction. Ils cherchent à être heureux et libres, même si leurs conceptions de la vie s’avèrent très différentes.

Une histoire dense et passionnante, des personnages complexes et attachants, des réflexions poussées sur des thématiques actuelles, et des planches absolument sublimes qui nous font faire le tout du globe… J’ai tout adoré !

Couverture de la bande dessinée Carbone & Silicium de Mathieu Bablet

Planètes de Makoto Yukimura

Des mangas pour découvrir la science-fiction ? Avec cette série, c’est un grand oui ! Planètes nous emmène dans un avenir proche, où les voyages dans le Cosmos sont devenus chose commune. Nous suivons le quotidien de trois astronautes, et plus particulièrement de Hachimaki, jeune homme solitaire. Chargés de ramasser les débris spatiaux qui dérivent autour de la Terre, ces employés ordinaires sont comparés à des éboueurs de l’espace.

Vous profiterez d’une SF réaliste, qui se concentre sur l’individualité des protagonistes. Pas d’actions épiques ici. L’auteur s’intéresse avant tout aux petits rien qui font l’existence, et sait nous rendre ses personnages familiers au fil des pages. Ajoutez des dessins magnifiques, et vous obtenez la garantie d’un moment doux et lumineux, même dans l’immensité de l’Univers.

Lire un roman de science-fiction après avoir vu son adaptation en film ou en série

Un classique de la SF vous fait de l’œil ? Voici une bonne solution pour se frotter à des œuvres intimidantes : les lire après avoir vu leur adaptation. De nombreux titres ont été portés à l’écran, ce qui vous permettra de confirmer (ou non) votre intérêt. Nul doute que le texte vous apportera ensuite une multitude d’éclairages et de détails supplémentaires (voire des arcs narratifs complets n’ayant pas pu être conservés).

Silo d’Hugh Howey

Ce livre a connu un succès international, avant d’être adapté en série en 2023 sur Apple TV. Dans un futur post-apocalyptique, les survivants de l’humanité se sont réfugiés dans un gigantesque silo. Nous ne savons pas vraiment quelles sont les causes de cet enfermement, mais seulement que les personnes qui sortent de l’abri meurent en quelques minutes, empoisonnées par un air vicié.

Ambiance oppressante de huis clos, enquête policière, mystères et rebondissements… Une histoire de SF assez classique, mais diablement efficace.

Vous avez déjà dévoré la saison 1 de la série et vous êtes frustré par le cliffhanger final ? Bonne nouvelle : l’auteur a écrit une trilogie et seul le tome 1 a pour le moment été adapté. Vous pouvez donc prendre de l’avance en lisant le tome 2, qui se concentre sur les origines du silo, puis le dernier opus qui conclut les aventures des habitants.

L’histoire de ta vie de Ted Chiang (Premier contact)

Si vous avez été soufflé par Premier Contact (Arrival en VO) de Denis Villeneuve, j’ai le livre qu’il vous faut ! En effet, le film est adapté d’une nouvelle de Ted Chiang, auteur récompensé par une multitude de prix littéraires.

Le récit en question, L’histoire de ta vie, a été publié en français au sein du recueil La Tour de Babylone. L’occasion idéale de plonger dans l’imagination débridée de cet écrivain qui excelle dans ses nouvelles. Impossible de vous ennuyer entre les uchronies, le thriller et les extra-terrestres !

Dune de Franck Herbert

On termine en beauté avec ce chef-d’œuvre à lire absolument. Est-ce que j’ai écrit tout le contraire en début d’article ? Parfaitement, mais je trouve que ce roman fait figure d’exception parmi les grands classiques de la science-fiction, tellement il reste moderne et facile à lire.

Si vous êtes impressionné par le nombre de pages et la densité de l’univers, le visionnage préalable des deux films de Denis Villeneuve (encore) vous donnera l’assurance de ne pas vous sentir perdu. Vous aurez alors le plaisir de découvrir les personnages et les concepts qui n’ont pas été exploités sur grand écran. Une lecture puissante et fascinante, qui n’a rien perdu de sa magie originale.

⏩Pour continuer votre exploration, ne manquez pas cette liste de romans dystopiques pour adultes !

Panne de lecture ? Mes 9 idées de courts romans à dévorer

Vous avez envie de vous mettre à la lecture et vous cherchez des titres accrocheurs, qui sauront vous captiver à coup sûr ? Vous ressentez un manque de concentration et vous avez besoin d’un format court et immersif ? Ou vous avez tout simplement envie d’une lecture rapide, que vous pourrez dévorer en une bouchée ? Vous êtes au bon endroit !

Je vous propose une sélection de neuf romans percutants, riches en émotions et addictifs. Les thèmes et les genres sont variés, mais une chose est assurée : ça va secouer !

1/ Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes : le chef-d’œuvre incontournable

252 pages

Ce roman iconique fait l’unanimité : c’est celui que j’ai le plus conseillé, et les lecteurs en ressortent toujours bouleversés. Je vous ai promis de l’immersion, et selon moi cet ouvrage est un must à ce niveau. Il est écrit du point de vue de Charlie, un simple d’esprit qui bénéficie d’une expérience scientifique révolutionnaire, lui permettant un accroissement spectaculaire de ses facultés intellectuelles. Il crée un lien particulier avec Algernon, une souris de laboratoire utilisée pour tester le traitement avant lui.

Charlie partage son expérience dans un journal intime, et nous vivons son évolution par ce biais, en déchiffrant d’abord ses phrases laborieuses, qui se transforment petit à petit, tant sur la forme que sur le fond. Car le jeune homme devient capable d’appréhender le monde qui l’entoure, et avec la compréhension vient la honte de son ancien lui, la conscience des injustices, l’envie, les sentiments amoureux. L’intelligence mène-t-elle au bonheur ?

L’histoire aborde des questions passionnantes, souvent existentielles, mais la réflexion ne se fait pas au détriment des émotions provoquées chez le lecteur. Ce n’est rien de dire que je me suis attachée à Charlie, et j’ai terminé ce livre en larmes. Il m’a laissé une trace indélébile, et je l’ai relu à de nombreuses reprises. Publié en 1966, la justesse et la puissance de son propos restent intactes.

Si vous n’avez pas encore découvert cette œuvre magistrale et universelle, voilà votre nouvelle priorité ! 

2/ Sukkwan Island de David Vann : une plongée dans le noir

Couverture du livre Sukkwan Island de David Vann, une de mes idées de roman court

208 pages

Le pitch de ce livre est simple : un huis clos oppressant entre un père et son fils dans la nature sauvage de l’Alaska. Vous trouvez qu’il n’y a là rien d’original ? Peut-être, mais à partir de cette mise en place dépouillée, l’auteur réussit un coup de maître.

Il s’agit du premier roman de David Vann, le spécialiste des histoires sombres, glauques, dans lesquelles il décortique les relations humaines et la noirceur de ses personnages. Et c’est là le premier point fort de l’ouvrage : il nous plonge sans retenue dans la psychologie des deux protagonistes, et décrit leur intériorité de façon presque clinique. 

Seconde réussite : l’ambiance. Il ne se passe pas grand-chose dans cette cabane isolée, entre ces deux hommes presque mutiques et de plus en plus tendus, peinant sous le poids des non-dits et des fragilités du père de famille. Mais David Vann sait s’y prendre pour faire monter l’anxiété, et nous faire partager l’atmosphère asphyxiante qui règne sur la petite île, les moments de gêne douloureuse, les échecs répétés de toute compréhension mutuelle entre ces deux quasi-inconnus.

Et enfin, le dernier point qui permet à ce titre de se démarquer : l’auteur ose ! Et c’est décoiffant… Mais je ne peux pas vous en dire plus à ce sujet, il vous faudra découvrir l’histoire par vous-même.

Warning : pour éviter de vous faire spoiler, il est vivement conseillé de lire la préface après avoir terminé le roman. Ce serait vraiment, vraiment dommage de ne pas aborder l’histoire sans trop en savoir.

Le seul bémol que j’apporterais porte sur la seconde partie du livre, un peu trop longue à mon goût, et qui finit par tourner en rond.

Si vous cherchez un thriller psychologique tranchant comme une lame, profondément glaçant et sordide, ne cherchez plus ! Vous risquez de vous souvenir longtemps de certaines pages que l’on dévore les yeux écarquillés et le ventre serré…

3/ La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé : guerre et philosophie

204 pages

Embarquez pour un récit épique et cruel, une tragédie dans laquelle les massacres incessants démontrent la futilité du pouvoir et la vanité des hommes.

Dans un passé mythologique, au sein d’un pays imaginaire d’Afrique, le vieux roi Tsongor s’apprête à marier sa fille en grandes pompes. Mais voilà, un prétendant inattendu se présente à la cour, invoquant une promesse d’enfants à son profit. 

C’est le début d’une guerre sans fin, dont les motifs dépassent bientôt l’enjeu amoureux initial. La victoire devient une question d’honneur et d’orgueil, et dès lors, il ne reste qu’un jeu perdu d’avance, dans lequel les parties, mêmes agonisantes, ne peuvent plus se permettre de renoncer. On bascule dans la folie guerrière, l’hystérie collective, qui viennent oblitérer les nobles sentiments initiaux, la loyauté, la fidélité, l’amour.

En parallèle des combats incessants qui dévorent la ville, le lecteur suit Souba, le fils du roi, envoyé par celui-ci dans une quête spirituelle à travers le royaume. Cet exil lui permettra d’être le seul à échapper à la violence, mais aussi de découvrir l’homme qu’a été son père, souverain d’un immense royaume conquis, encore et toujours, par la guerre. 

Cette partie constitue un contrepoint marqué au récit parallèle du champ de bataille, Souba évoluant dans la solitude et le silence. Elle porte des interrogations sur la notion de transmission à ses descendants, et le poids de la honte qui peut être reçu en héritage.

L’histoire alterne donc entre stratégie guerrière, luttes de pouvoir, et brefs moments d’intériorité. La violence est omniprésente, servie par une plume évocatrice et précise, mélodieuse, poétique parfois. Le tout forme un roman dévastateur et sans concession, d’un grand pessimisme sur la nature humaine, que l’on referme un peu sonné.

4/ King Kong Théorie de Virginie Despentes : anticonformisme féministe

Couverture du livre King Kong Théorie de Virginie Despentes, une idée de livre court

160 pages

Un essai pour se remettre à la lecture ? Oui, quand il est signé par Virginie Despentes et se trouve donc propulsé par son style tranchant et viscéral. L’énergie bouillonne entre ces lignes, et on est emporté par son flux vivifiant. L’ouvrage constitue aussi un témoignage, construit sur la base d’éléments autobiographiques, et il se lit aussi facilement qu’un roman.

Vous y trouverez une dénonciation féroce et grinçante des critères de beauté féminine, des carcans qui enferment les femmes, mais aussi les hommes, et du formatage des relations entre les sexes. L’autrice revient également sur sa construction personnelle et son parcours littéraire. Elle évoque des sujets sensibles comme le viol, la prostitution et la pornographie, et soutient des positions parfois à contre-courant de la pensée dominante, encore plus au moment de la sortie du livre en 2007.

C’est un texte dérangeant, qui suscite immanquablement des réticences. Vous serez tour à tour heurté, surpris, amusé, énervé, et plein d’interrogations. Débordant de sincérité et de franc-parler, écrit dans un langage cru, le livre démontre également une grande sensibilité. Les réflexions sont acérées et, que l’on soit d’accord ou pas, elles sont argumentées et permettent d’envisager de nouveaux points de vue. 

King Kong Théorie est un texte utile et direct, sans pincettes, un coup-de-poing qui fait voler en éclats les idées préconçues. 

5/ Solak de Caroline Hinault : un page-turner à déguster

160 pages

Voilà un thriller psychologique diablement efficace, porté par une plume magnifique, qui vous fera sans cesse hésiter entre l’envie impérieuse de tourner les pages et celle de relire calmement les petits diamants que constituent les phrases ciselées de l’autrice.

Un scientifique et deux militaires cohabitent sur une base perdue dans le cercle polaire arctique. L’isolement, la solitude, l’ennui, le froid et l’obscurité sont extrêmes, et la promiscuité ne facilite pas les relations entre les trois hommes. Lorsqu’une nouvelle recrue mystérieuse arrive, on comprend que cet équilibre déjà fragile va fatalement voler en éclats.

Ce roman m’a happée dès les premières pages et je l’ai littéralement englouti. L’autrice parvient immédiatement à nous faire comprendre la situation, on ressent les tensions et l’atmosphère délétère, et l’histoire démarre ainsi sans temps mort. 

Les personnages sont très bien campés, notamment dans leur façon de s’exprimer, et provoquent des sentiments forts chez le lecteur, que ce soit de l’empathie ou du dégoût. La nature polaire, le froid terrible, la grande nuit de l’hiver sont omniprésents et redoutés de tous. Cet environnement extrême constitue presque un cinquième personnage, tant il pèse sur toute l’histoire.

Mais surtout, le talent incroyable de l’autrice réside à mes yeux dans son style. Elle parvient à allier l’oralité bourrue du narrateur militaire désabusé, parfois vulgaire mais aussi plein de sagesse, à une poésie piquante de réalisme. Chaque page dévoile des phrases que l’on a envie de noter, tant elles visent juste et frappent fort.

Le dénouement ne m’a pas totalement séduite, mais n’a rien enlevé à la grande force qui se dégage de ce petit roman noir et brillant.

6/ La maison hantée de Shirley Jackson : à la frontière entre angoisse et folie

253 pages

Découvrez un classique de l’épouvante, qui exploite avec brio le fantasme de la maison hantée.

La star du roman, c’est Hill House, vieille bicoque abandonnée depuis des années, qui a la réputation d’être le théâtre de manifestations paranormales. Le docteur Montague, un célèbre professeur, décide de mener une étude sur ces phénomènes, et envoie donc du gibier tout frais s’installer dans la maison : trois jeunes gens triés sur le volet pour leurs capacités propres à favoriser les mystérieuses forces.

On visite avec eux une maison labyrinthique, à l’architecture déroutante et inquiétante. Mais l’histoire se concentre sur Eleanor, que l’on rencontre juste avant son arrivée à Hill House. En effet, si l’on est bien dans un roman fantastique avec une touche d’horreur, celle-ci reste toutefois assez légère. Les phénomènes paranormaux en eux-mêmes ne sont pas très nombreux, et l’essentiel se situe plutôt dans l’analyse psychologique de leurs effets sur les personnages. 

Eleanor apparaît rapidement assez instable et vulnérable, peu sûre d’elle, proie à de nombreuses interrogations et incertitudes, ce qui fait planer le doute sur ses perceptions de l’environnement et des autres protagonistes. Est-elle en train de basculer dans la folie ?

Le lecteur se retrouve en quelque sorte dans la position du Docteur Montague, au premier plan pour analyser les mécanismes de l’angoisse chez ses victimes volontaires. 

L’histoire possède un charme un peu suranné, et joue brillamment sur le malaise et la paranoïa, grâce à une construction très intelligente. Le lecteur ressent une angoisse de nature spéculative, plutôt que de la terreur face aux phénomènes en tant que tels.

L’autrice nous embarque avec ce roman efficace, simple à lire, distrayant et légèrement inquiétant jusqu’à ce que… Je n’en dirai pas plus !

N.B. : l’adaptation TV parue récemment sur Netflix (The Haunting of Hill House) s’inspire très librement du livre et modifie de très nombreux éléments, donc vous pouvez sans problème découvrir celui-ci même après avoir vu la série.

7/ Les dangers de fumer au lit de Mariana Enriquez : la beauté vénéneuse

Couverture du livre Les dangers de fumer au lit de Mariana Enriquez, une de mes idées de livre court

240 pages

La nouvelle n’est pas un format mis en avant en France, alors qu’on trouve des œuvres incroyables, et justement parfaites quand on n’a pas la motivation pour se plonger dans un roman.

Mariana Enriquez excelle dans ces courts récits qui regorgent d’idées inventives et surprenantes. Comme à son habitude, elle mêle horreur surnaturelle et réalisme politique. Ses histoires se situent en Argentine, et sont profondément ancrées dans l’histoire du pays.

On plonge avec délice et répulsion dans ces ambiances malsaines, qui mettent en scène des femmes de tout âge. Les thématiques sont modernes, l’écriture est puissante et visuelle. L’image des corps et de la chair est très présente, on s’immisce dans des obsessions étranges et des relations cruelles, et en toile de fond, on perçoit toutes les formes d’oppressions subies par les personnages. Névroses de notre temps, patriarcat, pauvreté, enlèvements sous la dictature, les sujets exploités sont nombreux.

Vous croiserez des fantômes, des revenants, des sorcières et des cannibales, avec un plaisir renouvelé en tant que lecteur européen, car toutes ces figures sont réinventées et innervées dans la culture sud-américaine.

N’hésitez pas à découvrir à votre rythme les douze textes de ce recueil, mais peut-être pas avant d’aller dormir !

8/ Chanson douce de Leïla Slimani : le réel au scalpel

256 pages

Ce drame psychologique, gagnant du prix Goncourt en 2016, frappe fort et juste.

Attention, vous ne serez pas ménagé par le réalisme sordide de certaines scènes, en particulier la scène d’ouverture qui vous cueille immédiatement et annonce la couleur. 

Deux jeunes parents accaparés par leur carrière confient leurs enfants à une nourrice reine de l’organisation et rassurante, et petit à petit, lui délèguent de plus en plus de morceaux de leur vie, jusqu’à ce qu’elle en fasse partie intégrante. Bénissant cette merveille tombée du ciel qui leur facilite tellement le quotidien, ils ne voient pas les cordes se nouer autour d’eux, et le dévouement de la nounou se transformer en codépendance malsaine. 

L’autrice met en scène un personnage de nourrice fascinant, complexe, qui commet le pire, mais suscite la pitié. De l’autre côté de la barrière, un couple moderne et privilégié, parfois égoïste et aveugle, mais surtout parfaitement banal, comme il en existe partout.

L’histoire permet à l’autrice de décortiquer les rapports de domination sociale et financière, la mise en place d’une aliénation aux conséquences dévastatrices. Elle parvient à maintenir un suspense oppressant alors que le drame final nous est dévoilé dès les premières pages. On regarde avec horreur les dominos tomber les uns après les autres, et c’est le ventre noué que l’on tourne les pages nous menant vers le point de bascule, le moment où la situation échappe à tout le monde. Le récit reste très factuel, ce qui le rend encore plus impitoyable. 

En somme, c’est l’histoire d’un fait divers, dans lequel tout avait si bien commencé… Une réalité plus terrifiante que les pires créations de l’imagination.

9/ L’œil le plus bleu de Toni Morrison : la puissance littéraire à l’état pur

224 pages

Il s’agit du premier roman de Toni Morrison, lauréate du prix Nobel de littérature en 1993. Il constitue selon moi une bonne porte d’entrée dans son univers : tous ses thèmes de prédilection sont présents, notamment le racisme, la vie des Noirs-Américains, l’enfance, la construction de soi. Mais il reste accessible, tout en étant l’une de ses œuvres les plus poignantes.

Dans les années 1940, une petite fille noire timide, qui se sent insignifiante et laide, rêve d’avoir des yeux bleus. Elle imagine ce que cela changera dans sa famille brisée.

C’est un texte d’une rare intensité, dans lequel des fillettes racontent leur quotidien, entourés d’adultes qui survivent dans l’ultra-violence du monde. Le fait que l’histoire soit portée par des regards d’enfants accentue encore la noirceur insupportable de leur environnement.

Les thèmes abordés sont extrêmement durs, et parfois choquants : alcool, misère, humiliation, brutalités, viol, inceste, folie, mort. C’est le style très singulier de l’autrice, plein de musicalité, d’associations et d’images, qui rend le récit (relativement) supportable. 

L’histoire est construite sous forme de patchwork, les circonstances sont évoquées de façon évasive, et l’accent est mis sur le ressenti. Il faut se laisser porter, et on est alors complètement pris à la gorge par les rêves et le destin de cette petite fille qui lutte avec ce qu’il lui reste, son imaginaire et son espoir. Ce qui ne pèse pas bien lourd dans une Amérique blanche et hostile. 

Après la lecture de ce livre, j’ai enchaîné tous les autres ouvrages de l’autrice, envoûtée par sa plume absolument unique. C’est un voyage éprouvant, explorant ce que cela signifie d’être Noir aux États-Unis à toutes les époques, et qui vous changera à coup sûr.

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