Vous avez envie de vous mettre à la lecture et vous cherchez des titres accrocheurs, qui sauront vous captiver à coup sûr ? Vous ressentez un manque de concentration et vous avez besoin d’un format court et immersif ? Ou vous avez tout simplement envie d’une lecture rapide, que vous pourrez dévorer en une bouchée ? Vous êtes au bon endroit !

Je vous propose une sélection de neuf romans percutants, riches en émotions et addictifs. Les thèmes et les genres sont variés, mais une chose est assurée : ça va secouer !

1/ Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes : le chef-d’œuvre incontournable

252 pages

Ce roman iconique fait l’unanimité : c’est celui que j’ai le plus conseillé, et les lecteurs en ressortent toujours bouleversés. Je vous ai promis de l’immersion, et selon moi cet ouvrage est un must à ce niveau. Il est écrit du point de vue de Charlie, un simple d’esprit qui bénéficie d’une expérience scientifique révolutionnaire, lui permettant un accroissement spectaculaire de ses facultés intellectuelles. Il crée un lien particulier avec Algernon, une souris de laboratoire utilisée pour tester le traitement avant lui.

Charlie partage son expérience dans un journal intime, et nous vivons son évolution par ce biais, en déchiffrant d’abord ses phrases laborieuses, qui se transforment petit à petit, tant sur la forme que sur le fond. Car le jeune homme devient capable d’appréhender le monde qui l’entoure, et avec la compréhension vient la honte de son ancien lui, la conscience des injustices, l’envie, les sentiments amoureux. L’intelligence mène-t-elle au bonheur ?

L’histoire aborde des questions passionnantes, souvent existentielles, mais la réflexion ne se fait pas au détriment des émotions provoquées chez le lecteur. Ce n’est rien de dire que je me suis attachée à Charlie, et j’ai terminé ce livre en larmes. Il m’a laissé une trace indélébile, et je l’ai relu à de nombreuses reprises. Publié en 1966, la justesse et la puissance de son propos restent intactes.

Si vous n’avez pas encore découvert cette œuvre magistrale et universelle, voilà votre nouvelle priorité ! 

2/ Sukkwan Island de David Vann : une plongée dans le noir

Couverture du livre Sukkwan Island de David Vann, une de mes idées de roman court

208 pages

Le pitch de ce livre est simple : un huis clos oppressant entre un père et son fils dans la nature sauvage de l’Alaska. Vous trouvez qu’il n’y a là rien d’original ? Peut-être, mais à partir de cette mise en place dépouillée, l’auteur réussit un coup de maître.

Il s’agit du premier roman de David Vann, le spécialiste des histoires sombres, glauques, dans lesquelles il décortique les relations humaines et la noirceur de ses personnages. Et c’est là le premier point fort de l’ouvrage : il nous plonge sans retenue dans la psychologie des deux protagonistes, et décrit leur intériorité de façon presque clinique. 

Seconde réussite : l’ambiance. Il ne se passe pas grand-chose dans cette cabane isolée, entre ces deux hommes presque mutiques et de plus en plus tendus, peinant sous le poids des non-dits et des fragilités du père de famille. Mais David Vann sait s’y prendre pour faire monter l’anxiété, et nous faire partager l’atmosphère asphyxiante qui règne sur la petite île, les moments de gêne douloureuse, les échecs répétés de toute compréhension mutuelle entre ces deux quasi-inconnus.

Et enfin, le dernier point qui permet à ce titre de se démarquer : l’auteur ose ! Et c’est décoiffant… Mais je ne peux pas vous en dire plus à ce sujet, il vous faudra découvrir l’histoire par vous-même.

Warning : pour éviter de vous faire spoiler, il est vivement conseillé de lire la préface après avoir terminé le roman. Ce serait vraiment, vraiment dommage de ne pas aborder l’histoire sans trop en savoir.

Le seul bémol que j’apporterais porte sur la seconde partie du livre, un peu trop longue à mon goût, et qui finit par tourner en rond.

Si vous cherchez un thriller psychologique tranchant comme une lame, profondément glaçant et sordide, ne cherchez plus ! Vous risquez de vous souvenir longtemps de certaines pages que l’on dévore les yeux écarquillés et le ventre serré…

3/ La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé : guerre et philosophie

204 pages

Embarquez pour un récit épique et cruel, une tragédie dans laquelle les massacres incessants démontrent la futilité du pouvoir et la vanité des hommes.

Dans un passé mythologique, au sein d’un pays imaginaire d’Afrique, le vieux roi Tsongor s’apprête à marier sa fille en grandes pompes. Mais voilà, un prétendant inattendu se présente à la cour, invoquant une promesse d’enfants à son profit. 

C’est le début d’une guerre sans fin, dont les motifs dépassent bientôt l’enjeu amoureux initial. La victoire devient une question d’honneur et d’orgueil, et dès lors, il ne reste qu’un jeu perdu d’avance, dans lequel les parties, mêmes agonisantes, ne peuvent plus se permettre de renoncer. On bascule dans la folie guerrière, l’hystérie collective, qui viennent oblitérer les nobles sentiments initiaux, la loyauté, la fidélité, l’amour.

En parallèle des combats incessants qui dévorent la ville, le lecteur suit Souba, le fils du roi, envoyé par celui-ci dans une quête spirituelle à travers le royaume. Cet exil lui permettra d’être le seul à échapper à la violence, mais aussi de découvrir l’homme qu’a été son père, souverain d’un immense royaume conquis, encore et toujours, par la guerre. 

Cette partie constitue un contrepoint marqué au récit parallèle du champ de bataille, Souba évoluant dans la solitude et le silence. Elle porte des interrogations sur la notion de transmission à ses descendants, et le poids de la honte qui peut être reçu en héritage.

L’histoire alterne donc entre stratégie guerrière, luttes de pouvoir, et brefs moments d’intériorité. La violence est omniprésente, servie par une plume évocatrice et précise, mélodieuse, poétique parfois. Le tout forme un roman dévastateur et sans concession, d’un grand pessimisme sur la nature humaine, que l’on referme un peu sonné.

4/ King Kong Théorie de Virginie Despentes : anticonformisme féministe

Couverture du livre King Kong Théorie de Virginie Despentes, une idée de livre court

160 pages

Un essai pour se remettre à la lecture ? Oui, quand il est signé par Virginie Despentes et se trouve donc propulsé par son style tranchant et viscéral. L’énergie bouillonne entre ces lignes, et on est emporté par son flux vivifiant. L’ouvrage constitue aussi un témoignage, construit sur la base d’éléments autobiographiques, et il se lit aussi facilement qu’un roman.

Vous y trouverez une dénonciation féroce et grinçante des critères de beauté féminine, des carcans qui enferment les femmes, mais aussi les hommes, et du formatage des relations entre les sexes. L’autrice revient également sur sa construction personnelle et son parcours littéraire. Elle évoque des sujets sensibles comme le viol, la prostitution et la pornographie, et soutient des positions parfois à contre-courant de la pensée dominante, encore plus au moment de la sortie du livre en 2007.

C’est un texte dérangeant, qui suscite immanquablement des réticences. Vous serez tour à tour heurté, surpris, amusé, énervé, et plein d’interrogations. Débordant de sincérité et de franc-parler, écrit dans un langage cru, le livre démontre également une grande sensibilité. Les réflexions sont acérées et, que l’on soit d’accord ou pas, elles sont argumentées et permettent d’envisager de nouveaux points de vue. 

King Kong Théorie est un texte utile et direct, sans pincettes, un coup-de-poing qui fait voler en éclats les idées préconçues. 

5/ Solak de Caroline Hinault : un page-turner à déguster

160 pages

Voilà un thriller psychologique diablement efficace, porté par une plume magnifique, qui vous fera sans cesse hésiter entre l’envie impérieuse de tourner les pages et celle de relire calmement les petits diamants que constituent les phrases ciselées de l’autrice.

Un scientifique et deux militaires cohabitent sur une base perdue dans le cercle polaire arctique. L’isolement, la solitude, l’ennui, le froid et l’obscurité sont extrêmes, et la promiscuité ne facilite pas les relations entre les trois hommes. Lorsqu’une nouvelle recrue mystérieuse arrive, on comprend que cet équilibre déjà fragile va fatalement voler en éclats.

Ce roman m’a happée dès les premières pages et je l’ai littéralement englouti. L’autrice parvient immédiatement à nous faire comprendre la situation, on ressent les tensions et l’atmosphère délétère, et l’histoire démarre ainsi sans temps mort. 

Les personnages sont très bien campés, notamment dans leur façon de s’exprimer, et provoquent des sentiments forts chez le lecteur, que ce soit de l’empathie ou du dégoût. La nature polaire, le froid terrible, la grande nuit de l’hiver sont omniprésents et redoutés de tous. Cet environnement extrême constitue presque un cinquième personnage, tant il pèse sur toute l’histoire.

Mais surtout, le talent incroyable de l’autrice réside à mes yeux dans son style. Elle parvient à allier l’oralité bourrue du narrateur militaire désabusé, parfois vulgaire mais aussi plein de sagesse, à une poésie piquante de réalisme. Chaque page dévoile des phrases que l’on a envie de noter, tant elles visent juste et frappent fort.

Le dénouement ne m’a pas totalement séduite, mais n’a rien enlevé à la grande force qui se dégage de ce petit roman noir et brillant.

6/ La maison hantée de Shirley Jackson : à la frontière entre angoisse et folie

253 pages

Découvrez un classique de l’épouvante, qui exploite avec brio le fantasme de la maison hantée.

La star du roman, c’est Hill House, vieille bicoque abandonnée depuis des années, qui a la réputation d’être le théâtre de manifestations paranormales. Le docteur Montague, un célèbre professeur, décide de mener une étude sur ces phénomènes, et envoie donc du gibier tout frais s’installer dans la maison : trois jeunes gens triés sur le volet pour leurs capacités propres à favoriser les mystérieuses forces.

On visite avec eux une maison labyrinthique, à l’architecture déroutante et inquiétante. Mais l’histoire se concentre sur Eleanor, que l’on rencontre juste avant son arrivée à Hill House. En effet, si l’on est bien dans un roman fantastique avec une touche d’horreur, celle-ci reste toutefois assez légère. Les phénomènes paranormaux en eux-mêmes ne sont pas très nombreux, et l’essentiel se situe plutôt dans l’analyse psychologique de leurs effets sur les personnages. 

Eleanor apparaît rapidement assez instable et vulnérable, peu sûre d’elle, proie à de nombreuses interrogations et incertitudes, ce qui fait planer le doute sur ses perceptions de l’environnement et des autres protagonistes. Est-elle en train de basculer dans la folie ?

Le lecteur se retrouve en quelque sorte dans la position du Docteur Montague, au premier plan pour analyser les mécanismes de l’angoisse chez ses victimes volontaires. 

L’histoire possède un charme un peu suranné, et joue brillamment sur le malaise et la paranoïa, grâce à une construction très intelligente. Le lecteur ressent une angoisse de nature spéculative, plutôt que de la terreur face aux phénomènes en tant que tels.

L’autrice nous embarque avec ce roman efficace, simple à lire, distrayant et légèrement inquiétant jusqu’à ce que… Je n’en dirai pas plus !

N.B. : l’adaptation TV parue récemment sur Netflix (The Haunting of Hill House) s’inspire très librement du livre et modifie de très nombreux éléments, donc vous pouvez sans problème découvrir celui-ci même après avoir vu la série.

7/ Les dangers de fumer au lit de Mariana Enriquez : la beauté vénéneuse

Couverture du livre Les dangers de fumer au lit de Mariana Enriquez, une de mes idées de livre court

240 pages

La nouvelle n’est pas un format mis en avant en France, alors qu’on trouve des œuvres incroyables, et justement parfaites quand on n’a pas la motivation pour se plonger dans un roman.

Mariana Enriquez excelle dans ces courts récits qui regorgent d’idées inventives et surprenantes. Comme à son habitude, elle mêle horreur surnaturelle et réalisme politique. Ses histoires se situent en Argentine, et sont profondément ancrées dans l’histoire du pays.

On plonge avec délice et répulsion dans ces ambiances malsaines, qui mettent en scène des femmes de tout âge. Les thématiques sont modernes, l’écriture est puissante et visuelle. L’image des corps et de la chair est très présente, on s’immisce dans des obsessions étranges et des relations cruelles, et en toile de fond, on perçoit toutes les formes d’oppressions subies par les personnages. Névroses de notre temps, patriarcat, pauvreté, enlèvements sous la dictature, les sujets exploités sont nombreux.

Vous croiserez des fantômes, des revenants, des sorcières et des cannibales, avec un plaisir renouvelé en tant que lecteur européen, car toutes ces figures sont réinventées et innervées dans la culture sud-américaine.

N’hésitez pas à découvrir à votre rythme les douze textes de ce recueil, mais peut-être pas avant d’aller dormir !

8/ Chanson douce de Leïla Slimani : le réel au scalpel

256 pages

Ce drame psychologique, gagnant du prix Goncourt en 2016, frappe fort et juste.

Attention, vous ne serez pas ménagé par le réalisme sordide de certaines scènes, en particulier la scène d’ouverture qui vous cueille immédiatement et annonce la couleur. 

Deux jeunes parents accaparés par leur carrière confient leurs enfants à une nourrice reine de l’organisation et rassurante, et petit à petit, lui délèguent de plus en plus de morceaux de leur vie, jusqu’à ce qu’elle en fasse partie intégrante. Bénissant cette merveille tombée du ciel qui leur facilite tellement le quotidien, ils ne voient pas les cordes se nouer autour d’eux, et le dévouement de la nounou se transformer en codépendance malsaine. 

L’autrice met en scène un personnage de nourrice fascinant, complexe, qui commet le pire, mais suscite la pitié. De l’autre côté de la barrière, un couple moderne et privilégié, parfois égoïste et aveugle, mais surtout parfaitement banal, comme il en existe partout.

L’histoire permet à l’autrice de décortiquer les rapports de domination sociale et financière, la mise en place d’une aliénation aux conséquences dévastatrices. Elle parvient à maintenir un suspense oppressant alors que le drame final nous est dévoilé dès les premières pages. On regarde avec horreur les dominos tomber les uns après les autres, et c’est le ventre noué que l’on tourne les pages nous menant vers le point de bascule, le moment où la situation échappe à tout le monde. Le récit reste très factuel, ce qui le rend encore plus impitoyable. 

En somme, c’est l’histoire d’un fait divers, dans lequel tout avait si bien commencé… Une réalité plus terrifiante que les pires créations de l’imagination.

9/ L’œil le plus bleu de Toni Morrison : la puissance littéraire à l’état pur

224 pages

Il s’agit du premier roman de Toni Morrison, lauréate du prix Nobel de littérature en 1993. Il constitue selon moi une bonne porte d’entrée dans son univers : tous ses thèmes de prédilection sont présents, notamment le racisme, la vie des Noirs-Américains, l’enfance, la construction de soi. Mais il reste accessible, tout en étant l’une de ses œuvres les plus poignantes.

Dans les années 1940, une petite fille noire timide, qui se sent insignifiante et laide, rêve d’avoir des yeux bleus. Elle imagine ce que cela changera dans sa famille brisée.

C’est un texte d’une rare intensité, dans lequel des fillettes racontent leur quotidien, entourés d’adultes qui survivent dans l’ultra-violence du monde. Le fait que l’histoire soit portée par des regards d’enfants accentue encore la noirceur insupportable de leur environnement.

Les thèmes abordés sont extrêmement durs, et parfois choquants : alcool, misère, humiliation, brutalités, viol, inceste, folie, mort. C’est le style très singulier de l’autrice, plein de musicalité, d’associations et d’images, qui rend le récit (relativement) supportable. 

L’histoire est construite sous forme de patchwork, les circonstances sont évoquées de façon évasive, et l’accent est mis sur le ressenti. Il faut se laisser porter, et on est alors complètement pris à la gorge par les rêves et le destin de cette petite fille qui lutte avec ce qu’il lui reste, son imaginaire et son espoir. Ce qui ne pèse pas bien lourd dans une Amérique blanche et hostile. 

Après la lecture de ce livre, j’ai enchaîné tous les autres ouvrages de l’autrice, envoûtée par sa plume absolument unique. C’est un voyage éprouvant, explorant ce que cela signifie d’être Noir aux États-Unis à toutes les époques, et qui vous changera à coup sûr.

⏩ Découvrez aussi ce recueil de nouvelles qui fait frissonner !